Introduction
Il y a dans l’homme cette inclination à se retirer du collectif pour vivre un projet personnel. L'Ordre des Prêcheurs dont le fondateur est Saint Dominique a préféré opter pour le choix de servir Dieu dans une communion interpersonnelle. La première phase de mon analyse s'efforcera donc de montrer que la vie en communauté est un don de Dieu et non un projet humain. La deuxième partie de ma réflexion insistera sur deux dimensions de cette vie en communauté : la fraternité et la collaboration entre les membres dans le respect des règles établies.
1) La vie en communauté : un don de Dieu
En créant l'homme à son image, Dieu l'a créé pour la communion. Ce substantif vient du grec "koinonia" qui a deux dimensions essentielles, l’une verticale et transcendante signifiant la relation de tous les dominicains avec Dieu, l’autre horizontale signifiant le lien de tous ces chrétiens entre eux, en tout temps et en tous lieux. A propos de la vie en communauté, Frère Oliveto affirme « La vie dans l’Esprit Saint n’est pas seulement la vie intérieure de l’âme individuelle. Nul d’entre nous n’est jamais totalement seul face à Dieu”1. Dieu créateur s'est révélé comme Amour, Trinité et communion2. Dieu convie donc les Frères Prêcheurs à une relation intime avec Lui ainsi qu'à une communion interpersonnelle. Autrement dit, la vie en communauté est une initiative divine avant d'être une construction humaine. Elle ne s'enracine pas dans des sympathies personnelles ou des motifs humains. Elle est un don divin. Elle prend naissance chez les moines grâce à la force agissante du Saint Esprit qui opère dans leur âme. La vie commune ne se dissocie donc pas du projet de salut que Dieu a voulu pour les hommes. Elle trouve sa source dans le coeur même de la Trinité sainte.
2.Les deux dimensions de la vie en communauté chez l'Ordre des Prêcheurs
2.1 La communion fraternelle
Bien qu'il soit le fondateur de l'Ordre des dominicains, Sainte Dominique « n'a pas laissé le récit de son expérience spirituelle ni précisé le chemin à suivre pour les frères et les soeurs qu'il avait groupés en communautés. Ses successeurs ont pourtant dessiné par leur action et par leur enseignement un chemin propre, une voie des Prêcheurs » 3
3 Frère Augustin LAFFAY, présentation du module de la spiritualité dominicaine
2 1Epître de Jean 1,2
1 Frère Oliveto, Introduction “ Ecouter la Parole de Dieu” extrait du 2ème pilier spirituel du cours 2 :” Composition de la Règle bénédictine
Le Livre des Constitutions des Moniales de l'Ordre des Prêcheurs dont le contenu a été fortement inspiré de la Règle de Saint Augustin, fixe un certain nombre d'observances auxquelles le moine ne peut se soustraire. La communion fraternelle est d'ordre spirituel. Elle souligne la communion de vie et le rapport interpersonnel entre les membres de l'Ordre. La première observance du Livre des Constitutions des Moniales rappelle l'étiquette du double amour : « Avant tout, frères très chers, aimons Dieu, et ensuite le prochain, puisque ce sont les commandements qui nous ont été donné principalement. »4 . Le mot frères prend tout son sens chez les Prêcheurs. Le supérieur du couvent « le prieur » est un frère parmi les frères. Chaque membre de la communauté doit se décentrer par rapport à lui-même pour se mettre à l'écoute de l'autre. Le dialogue est très important dans la vie en communauté. Il exige qu'on porte attention à ce que dit l'autre. Le souci et l'intérêt du prochain constituent une caractéristique de l'Ordre dominicain. Chacun est amené à partager ensemble aussi bien les joies que les difficultés.
2.2 Collaboration et participation aux services et aux actes communs
L'objectif de la vie en communauté chez les dominicains c'est comme le rappelle la Règle de Saint Augustin : « habiter ensemble dans l’unanimité et de n’avoir plus, en Dieu qu’une seule âme et qu’un seul coeur.»5 La dimension visible de la vie communautaire chez l'Ordre des Mendiants se traduit par la participation et la collaboration actes communs et à la fidélité aux règles établies. Le moine ne doit rien posséder en propre, excepté ce qui est nécessaire pour vivre. Tout le reste doit être mis en commun. Frère Rodolphe témoigne à propos de Saint Dominique : ” Il aimait beaucoup la pauvreté et exhortait ses frères à le pratiquer. Dominique fit résilier un contrat de bien-fonds signé par Hodoric de Galicani au profit des moines en présence de l'évêque de Bologne. Il ne voulait pas que ses frères aient des richesses en leur recommandant de vivre d'aumône. De même, il n'aimait pas que les églises soient ornées”. La vie en communauté est fidèle à l'enseignement des premiers apôtres.”6 Chacun s'implique dans l'accomplissement de tâches communes. La vie en collectivité impose des exigences. Le dominicain ne peut se contenter d'être spectateur. Les Dominicains prient collectivement. La prière en commun revêt de multiples formes d’expression et de participation. Pour autant la prière communautaire n'occulte pas la prière personnelle car Dieu nous convie constamment à la prière. En priant sans relâche, le dominicain prend conscience de la présence continuelle du Seigneur.
Conclusion
Vivre radicalement en chrétien peut se faire de multiples manières Le mode de vie religieuse du dominicain fait de la fraternité un préalable pour grandir dans la foi. Seul l'amour pour Dieu et les autres frères peut rendre cela possible. Il s'avère donc que la fraternité constitue un lieu où chaque chrétien peut donner le meilleur de lui-même. Il se rend plus disponible à l'Esprit Saint et il devient plus à l'écoute des besoins du monde. Dans une époque où l'individualisme est si prégnant, la spiritualité dominicaine nous enseigne que c'est dans la communauté que la responsabilité de chacun accroît celle de l'autre
6 Acte des Apôtres 3, 44-45
5 Règle de Saint Augustin
4 Livre des Constitutions des Moniales de l'Ordre des Prêcheurs, § 1
THEO LOGOS DE LA CROIX
Ajouter un commentaire